Première partie : la préparation
Je vous proposerai d’ici quelques mois un recueil d’une cinquantaine de nouvelles de deux à quatre pages chacune, recueil intitulé : Un jour…, mêlant la vie, le rêve et la poésie. Ces nouvelles ont la particularité d’être écrites uniquement en écriture automatique, d’un seul jet, en moins de vingt minutes à une heure chaque,
Je voudrais vous parler, au travers de cet article, de cette expérience enrichissante et troublante à la fois, et quelque peu inconfortable pour l’auteur qui aborde cet exercice.
C’est une sensation éprouvante, qui met le corps entier à rude épreuve, car cet exercice, cher aux surréalistes comme André Breton, oblige à affronter une double difficulté : conserver l’influx nerveux du premier au dernier mot, et se refuser de chercher la construction d’une phrase, d’un paragraphe, ou de revenir sur le moindre terme. Je m’interdis d’ailleurs de retoucher le texte, pour quelque raison que ce soit, y compris une faute de syntaxe éventuelle ou même de corriger l’orthographe. L’inspiration doit me guider dès la première seconde, et jusqu’au terme de la nouvelle. Sinon, je jette le tout sans aucun remords…
Techniquement, cela paraît simple. Je pensais même, avant de m’y donner une première fois par expérience, puis de m’y adonner, de nombreuses fois, par goût, que cette chose étrange relevait pour ainsi dire, et pour le moins, du phénomène de foire, et pour le pire, d’une petite escroquerie destinée à leurrer des gogos prêts à croire au talent des ombres, dont l’auteur ne serait que le porteur, le transmetteur, le “restitueur“…
La première fois, j’ai abordé l’écriture automatique avec une grande désinvolture, sourire aux lèvres, comme un prestidigitateur défiant un prétendu magicien, un sorcier, un chamane, certitude affichée de démonter, puis démontrer le “truc“ en quelques minutes, ou même quelques secondes.
De fait, comme prévu, il ne se passa rien.
Je m’en ouvris à un ami ayant osé l’expérience, le sollicitant comme guide spirituel. Mais j’avoue, je le traitai aussi en charlatan, ou bien proche, l’esprit empreint dune égale circonspection.
Une seconde fois, il ne se passa rien.
Je désespérai déjà, étant fourni depuis ma naissance d’un caractère entier. Mon ami sut me rassurer, m’affirmant que lui-même avait remis sur son ouvrage près de trente fois le métier. Il m’enseigna également que chaque tentative nous apprend à maîtriser une autre forme de discipline, non plus celle du travail acharné, mais celle de l’abandon total. Ainsi, l’impuissance devait devenir une règle, l’accord et l’acceptation de l’abandon une loi. Pour me rassurer tout à fait, il me convia à assister à une séance. Où ? Quand ? Comment ? furent mes seules questions. Ile ne put répondre à aucune des trois, ne sachant lui-même quand l’envie impérieuse le tourmenterait. Je conservai intacte ma perplexité.
Un appel me parvint de lui, trois jours plus tard. Je laissai un rendez-vous en plan, curieux de savoir, avec toujours une pointe d’ironie et de circonspection, mais docile comme un jeune homme qu’une femme convoque à son premier quart d’heure amoureux….
(à suivre…)